l'année du Brésil

Publié le par ARNO

les nouvelles nouvelles
chroniques très personnelles à vocations et parutions aléatoires

Arles, le 12 septembre 2005

l'année du Brésil

2005, l'année du Brésil. Les rythmes endiablés, les danses enflammées débarquent en France.
Manque de bol, la chaleur de ces flammes s'est propagée récemment dans quelques squats
parisiens. Depuis le début de l'année, ces sinistres ont fait 48 victimes, dont la moitié en août
pour les deux derniers en date.
Notre Ministre de l'Intérieur, lui, ne perd jamais une occasion de jouer avec le feu. Après
avoir déclaré les pompiers ininflammables, il a décidé d'éteindre les incendies parisiens à
grands coups de Kärcher. Et c'est ainsi qu'on a procédé à l'expulsion de deux squats le jour
même de la rentrée scolaire.
Avec un cynisme très gouvernemental, on profite de la vague provoquée par ces drames tout
frais pour exclure un peu plus ceux qui n'ont déjà presque rien. Et pour brosser gentiment un
certain électorat dans le sens du poil, on déplace un problème à défaut de le régler. Sans
oublier d'assurer le spectacle, en invitant les équipes de TF1 et RTL à couvrir l'événement. A
quand les retransmissions en direct ?
Ironie du sort, l'un de ces squats se situait rue de la Fraternité. Leurs habitants devaient être
relogés dans quelques mois. Ils venaient d'installer une deuxième issue de secours, des
extincteurs, avaient instaurés des tours de garde la nuit et même organisé un exercice
d'évacuation la semaine précédent leur expulsion. De l'avis général, leur squat était l'un des
mieux entretenus de la capitale. Hélas pour eux, le marchand de biens propriétaire du lieu
était impatient d'encaisser sa plus-value. Et la France d'en bas a décidément bien du mal à
lutter contre la France qui gagne. Surtout celle qui gagne des dividendes.
Pour lutter contre le problème du logement, le Premier Ministre a quant à lui sollicité la
création de 5000 logements, confiés à la Sonacotra. Livraison prévue le 31 mars prochain.
Mais de l'avis même des responsables de cette entreprise, ce délai ne permettra rien d'autre
que l'alignement de préfabriqués dans des friches industrielles. Et avec eux la charmante
perspective de ghettos programmés. On avait pas parlé d'une loi de cohésion sociale ?
Excusez moi, j'ai dû mal comprendre…
Pour l'instant, les expulsés sont logés dans des hôtels de la grande banlieue. Il n'y a parmi eux
aucun clandestin, tous sont en situation régulière ou régularisable. En général, ils travaillent
de nuit à Paris à faire les métiers dont personne ne veut : ménages, nettoyage du métro ou
ramassage des poubelles. Des fonctions qu'ils ne pourront plus assumer en habitant à l'écart
de la ville. Pas plus que leurs enfants n'ont pu aller à l'école ce 2 septembre, s'éloignant de
leur quartier et des établissements où ils étaient inscrits au fil d'une promenade dans des cars
de CRS.
Dans quelques semaines, on fermera à ces gens la porte de leurs hôtels. Parions qu'il n'y aura
cette fois personne de TF1 ni de RTL pour parler de ces mises à la rue. Et pour fêter l'année du
Brésil avec un subtil sens du détail et de la mise en scène, on verra bientôt pousser des favelas
dans la banlieue parisienne.
Et pour l'année de l'Afrique du Sud, on relance l'Apartheid ?
Exotisme, quand tu nous tiens…

Ach, No !

Publié dans kavyart

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